jeudi 15 décembre 2022

Podcast JDR : La génération d'images par des "Intelligences Artificielles" va-t-elle bouleverser le monde de l'illustration ?

 

(Durée 02 : 03 : 25)
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Depuis deux décennies, nos appareils photos et nos logiciels de retouches photographiques ont appris à reconnaître un objet ou une personne sur une image. Nos outils informatiques ont appris à nous reconnaitre. Du moins, ont-ils appris à reconnaître ce qu'était l'image d'un être humain. Or de cette reconnaissance de l'image d'une personne, à la génération de l'image d'une personne qui n'existe pas, il n'y avait qu'un pas. Ce pas a été franchi. Midjourney, Wombo, DALE.E 2, autant de laboratoires et d'outils en ligne capables de générer une image en un seul clic. Les conséquences sont innombrables. Hier, 14 Décembre 2022, Artstation connaissait un soulèvement d'artistes mobilisé(e)s contre les images générées par des Intelligences Artificielles (IA)...


Logo affiché hier par certains comptes sur Artstation

Cette semaine, avec Yoann Fichet (informaticien et photographe amateur), Darky (data scientist passionné par les IA) et Emma Deadly (graphiste et illustratrice indépendante), nous refaisons l'histoire de cette technologie, avant de nous lancer dans quelques prospectives et débats passionnants. Comment est-on passé de la reconnaissance d'une image à sa génération ? Cette technologie révolutionne-t-elle la peinture, les images, les arts numériques et, si oui, comment et pourquoi ? Cette technologie menacent-elles des artistes, lesquels ? Qui sont les laboratoires qui génèrent ces images et pourquoi sont-ils des laboratoires ? Le système est important et ce ne sont pas tant les IA que le monde dans lequel elles émergent qui laisse craindre le pire...

 

"Romaric sur un lama" AI generated image

 
Nous avons parfaitement conscience de n'aborder ici qu'une partie émergée d'un immense iceberg. Ce podcast suscitera à coup sûr des réactions et des frustrations. Laissez-nous vos commentaires. La Cellule a déjà programmé d'autres émissions sur le sujet. Nous essaierons de lire et de prendre un maximum de questions et de commentaires afin d'enrichir nos futurs débats sur ce sujet. 
 
 
Merci à toutes et à tous ! Portez-vous bien et surtout jouez bien !

12 commentaires :

  1. Grand merci à Antoine, Emma, Yoann et Darky pour ce débat ! Laissez-nous vos commentaires.

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  2. Hello,

    La sortie du podcast coincide avec une expérience que je viens de mener : je viens de créer un contexte de JdR d'ambiance cyberpunk avec GPT-3 (l'AI qui génère du texte quand on lui pose des questions). J'ai sélectionné des textes que j'ai générés via une série d'instructions, et je les ai retouché rapidement (principalement des coupes). J'ai généré des images avec Dall.e en fonction du texte, et fait une mise en page rapide. Ça m'a demandé 3-4 heures en tout (principalement des expérimentations sur les instructions). Je me suis interdit d'écrire quoi que ce soit moi sauf les titres et la page du sommaire, plus quelques petites retouches.

    C'est dispo ici si ça vous intéresse: https://drive.google.com/file/d/1MXGWpqAUmkDGwDEg5_VlXSiKGX7EUGDC/view?usp=sharing

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  3. c'est vraiment fascinant, Valentin ! Par contre en signant un tel texte du 14 décembre 2022, tu risques d'attirer des Bugs (réf. à Sens) =D

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  4. "Les révolutions industrielles laissent des gens sur carreau", est donc censé être un argument pour l'IA ? Vous oubliez que le sens de l'histoire n'existe pas, l'innovation technique est fondamentalement ancrée dans le politique. Quand la machine vient détruire une bonne partie du tissu économique des artisans durant le XIXème pour les envoyer à marche forcée sur les machines flambes en neuve des usines, cette "révolution" a LITTERALEMENT laissée des personnes sur le carreau, dont des gamins de même pas 10 ans.

    Le problème de l'argumentaire des pro "IA" c'est qu'ils esquivent toujours la part politique et le rapport de force qui existe entre ceux qui détiennent les moyens de production, et ceux qui sont obligés de se plier à cette élite qui leur impose par le haut des innovations sans jamais parler de la part démocratique que ça devrait engager. Déjà au XIXème siècle, les ingénieurs et certains savants louaient les machines par leur capacité à "libérer l'ouvrier". On y retrouve peu ou prou le même discours minimisant les transformations sociales que ça implique, avec cette admiration béate pour un progrès technique immuable, et qu'on ne pourra pas contester, pourquoi ? Parce que c'est comme ça, c'est le sens de l'histoire... Pratique pour faire taire toute contestation, mais in fine, l'argument est faible.

    Je ne suis pas contre les machines, ou contre l'innovation, certaines ont permis un confort supplémentaire sur des travaux pénibles/dangereux, personne ne peut le nier, mais ici dans mon propos, il n'est pas question de l'outil en lui même, il est surtout question de ce que ça implique en terme d'impact social dans un monde capitaliste au sein duquel les moyens de production sont inégalement répartis et appartiennent à une petite élite privilégiée qui décide pour vous de ce que sera votre vie. Soutien aux artistes.

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  5. Un épisode particulièrement difficile à écouter pour ma part.

    Le métier de graphiste était déjà mis en danger par la surreprésentation des étudiants sortant d’école sur le marché du travail (30+ candidats pour 1 poste). Il souffrait aussi d’un manque de reconnaissance (voir le Tumblr “Mon maçon était illustrateur”. Il n’est pas rare d’entendre un prospect dire après la réception d’un devis : “Non, mais j’ai mon petit neveu qui touche un peu à Photoshop, il va me faire ça pour moins cher”. Une grande majorité des personnes déclarant des revenus d’une activité artistique “visuelle” est sous le seuil de pauvreté.

    Avec l’IA, je peux vous dire que les costards cravates sont déjà en train d’envisager la réduction d’effectif de leur service Créa (Témoignage direct).

    Vous allez trouver ça ironique j’imagine, mais j’habite dans le bassin minier. Quand vous parliez des mineurs (mais idem pour l’industrie textile coté Roubaix-Tourcoing), vous évoquiez l’inquiétude de voir le métier disparaître, mais pas des conséquences sur la région : du chomage de masse, de la pauvreté, de l’alcoolisme, de la violence intrafamiliale.

    Mais après ça parle de “peur irrationnelle”...

    Désolé pour la réaction épidermique, mais entendre des personnes (que j’imagine) non-concernés balayer de la main les inquiétudes de professionnels déjà précarisés, ça laisse un goût amer à la fin du podcast.

    Désolé aussi que mon premier commentaire soit un commentaire négatif. Du coup, j’en profite pour féliciter la Cellule pour son travail en général, qui m’accompagne pendant que je gratte ma tablette graphique.

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  6. "Mais après ça parle de “peur irrationnelle”..."

    Merci pour votre témoignage K'.

    Cette phrase m'a aussi interpellé, cette "peur" est tout sauf irrationnelle, elle est même tout le contraire, c'est beaucoup plus rationnel de penser que sa subsistance matérielle est menacée par un nouvel outil qui sera l'apanage des cols blancs, plutôt que le contraire. Soutien à vous, pour ce que ça vaut.

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  7. A titre personnel, quand je parlais de peur irrationnelle, je pensais plutôt à celle liée "aux machines travaillant dans le noir" évoquées par Yoann, je pensais aussi à "this person does not exist"... la peur des graphistes de perdre leur emploi est parfaitement légitime et rationnelle. Il me semblait avoir été clair sur ce point. J'aurai l'occasion d'y revenir dans notre émission spéciale noël. Merci à tous les deux pour vos commentaires. Navré que Emma et moi même n'ayons pas été à la hauteur de vos espérances en matière de contradiction. On fera mieux la prochaine fois. Le débat est loin d'être clos.

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  8. En effet dommage que notre parole à tout deux n est pas été entendu pour ma part j ai pourtant exprimé clairement mes craintes et la peur pour le travail des personnes de mon secteur d'activité, mais clairement je ne me voyais pas pour une première participation avec des gens que je ne connaissais pas du tout, partir dans un débat houleux, pouvant entrainer colère entre les personnes présentes ^^

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  9. "Navré que Emma et moi même n'ayons pas été à la hauteur de vos espérances en matière de contradiction. On fera mieux la prochaine fois. Le débat est loin d'être clos."

    Aucun soucis, on ne peut pas tout couvrir non plus, le débat est immense, et je comprends qu'on ne puisse pas rentrer dans tous les détails sur une discussion fleuve de la sorte, en espérant vous revoir sur ce sujet à l'occasion, merci !

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  10. Pour être honnête, j'écoute souvent d'une oreille lointaine le podcast de la Cellule. Attiré par le titre, je clique sur lecture pour vite arrêter à la moitié, par manque d'intérêt (il en faut pour tous les goûts hin). Mais quelque fois je suis comme happé par les échanges, et je dois avouer que c'est plutôt plaisant. J'aime les débats. Mais là sur ce dernier podcast j'ai presque arrêté de bosser tellement j'étais dedans.

    Désolé pour ce long message. Si la Cellule n'était pas si loin de chez moi, j'essayerai de me faire volontiers inviter pour débattre derrière vos micro, mais je ne prends pas l'avion moi aussi.

    Le sujet est tellement vaste et vraiment intéressant, avec une coïncidence incroyable : je me suis mis à MidJourney il y a quinze jours, par curiosité et pour comprendre le sujet avant de parler avec des sentiments tribaux.

    Vous avez été bons dans vos propos ; justes aussi ; honnêtes. Seulement voilà, la peur que j'ai ressentie lorsque j'ai vu les premières images, générées par Midjourney, s'est faite de nouveau sentir au fur et à mesure que Darky (et Yoann) partageait (défendait un peu trop parfois ?) ses avis et ses envies.
    Entre : "l'écologie, ça ne veut rien dire du moment que tu compenses en prenant moins l'avion" ; "les illustrateurs doivent sans cesse se réinventer" ; et surtout son gros soucis à ne pas avoir d'empathie envers des problématiques majeures que vous autres lui avez exposés. Je me décomposais derrière mes écouteurs.
    Il m'a fait penser à un enfant avec un jouet entre les mains, comme beaucoup de scientifiques et autres qui inventent de nouvelles technologies sans cesse, sous prétexte que ça fait avancer la vie et la société.

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  11. (suite)
    Je pense sincèrement que beaucoup, surtout les artistes, doivent se réinventer à CAUSE de ce type de pensée qui régie notre sociale et notre société.. et non GRACE à.
    On est dans la consommation à outrance, dans une sollicitation à outrance ! On est dans le manque incroyable d'empathie envers les autres (et je ne parle pas de la biodiversité par l'écologie hin), et surtout à force de ne plus aider les gens à muscler leurs neurones - car oui si tous nos outils nous mâchent et prémâchent nos travails, nos créativités et nos loisirs l'humain aura moins besoin de faire marcher sa cacahuète. Je vois très bien les problématiques intellectuels de mes apprentis et de mes enfants.

    J'ai ressenti les peurs d''Emma - et pas que pour son métier - et de Romaric, ses peurs irrationnelles.
    Définition de le peur : Émotion qui accompagne la prise de conscience d'un danger, d'une menace.
    Alors : je suis paysagiste de métier, graphiste de loisir (j'utilise photoshop depuis presque 20 ans), Gniste dans l'âme (j'ai crée une asso de GN en 2015) c'est une passion, j'écris, je sculpte, je modèle, je peins, bref il me semble que j'ai un côté "artiste".
    Et bien ma peur c'est que tout ça passe dans un abysse froid et brutale ou la fibre artistique, le 1+1 = 3 lorsque l'on crée une chose artistique (ou pas ?), cette âme qui fait vivre une œuvre ne soit plus là, ou si peu là ( et oui car basée sur les œuvres de milliers d'artistes elle sera forcement diluée dans cette immense bouillie). La technique sera là mais pas l'âme ou si peu.
    Et bien j'ai peur moi d'être toujours dans une société qui vous oblige sans cesse à courir, mais aussi de ne plus avoir le sentiment de "plaisir" lorsque je crée - cette adrénaline et ce sourire vous savez -, car on me prémâchera ma créativité (c'est presque un vol) ; peur de perdre l'humain au profil de datas qui atrophieront invariablement beaucoup de cerveaux. Ca commence déjà.
    Et je ne vous parle pas des fakes par l'image qui risquent d'exploser, et qui demanderont un débumkage incroyable. La tension sociale mondiale humaine va monter de plusieurs crans.

    Désolé pour Darky d'être aussi franc, vraiment, envers lui (il a pas l'air méchant) et Yoann (car il me semble qu'il était en grosse partie d'accord avec lui) mais ma peur est fondée me semble-t-il : Le monde se tue petit à petit (rien n'a changer depuis les siècles de guerre me direz-vous), car là on commence par les vraies fausses images à la grande tristesse des illustrateurs, ensuite des photographes puis des journalistes, ... et après quoi ? les livres ? Les écrivains devront aussi se réinventer sans cesse ?

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  12. Autant le podcast est blindé de réflexions et informations interessantes, autant la partie juridique et morale vient à mon goût à manquer de pertinence.

    «Tu es propriétaire des input que tu met dans ton Photoshop, tu es propriétaire des input que tu met dans ton prompt »

    Bien j’ai envie de dire que c’est loin d’être toujours vrai pour ce qui est de Photoshop, mais à la limite, l’auteur de l’image a facilement l’opportunité de connaître la provenance des dits inputs…

    Autant certes pour une image générée par algo les mots-clés sont ta sélectionné autant derrière ces IA ont été entraînés dans leur immense majorité par des images prises sans le consentement de leurs auteurs et sans qui ces dites IA ne seraient rien.

    Et ça, ce n’est pas être bêtement contre le progrès, mais c’est une question collective qui se pose pour les faiseurs d’images, tant morale que pratique, dont on voit déjà les premiers préjudices se poser.

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